Orso M. a commencé, dès qu’il en eut les capacités motrices, à amonceler des pierres dans son coffre à jouets. Il a gratté le sol de la IVe République et acheté ses premiers spécimens avec ses premiers anciens francs. Il espérait à cette époque trouver des béryls en Corse, dans le jardin familial (et malgré l’irréductible évidence, il n’est pas certain qu’il y ait tout à fait renoncé).
Il a couvert des blocs-notes de dessins de cristaux fantaisistes, modelé des quartz rouges dans de la paraffine de Babybel, inventé pour la fête des mères des poèmes où l’idocrase est couleur framboise et de nickel le mispickel.
Il a passé ses jeudis après-midi collé comme une arapède aux vitrines du Muséum, traîné ses pauvres parents dans des contrées dangereuses* et d’infâmes souterrains.
Il a filmé tout ce qui ne bouge pas avec sa Brownie 8 mm, photographié avec son Photax, puis son Retina, son Rolleiflex, ses Hasselblads et Linhofs, ses appareils électroniques enfin.
Et voilà le résultat.
* En agrandissant (cliquant sur) la photo ci-dessus, on devine, dans la main du jeune maniaque cherchant, échantillon à l’appui, à convaincre sa mère du bien-fondé de leur aventureuse expédition, le marteau de géologue à long manche sensé servir à repousser les redoutables chiens sauvages —par crainte desquels personne ne s’aventure jamais bien loin de cette coquette Willys 8 cyl. modèle 1954— autant qu’à déterrer des espoirs d’opales sur ces plateaux scabreux.